Note : oui, je sais normalement on commence pas par une note mais avant d'aborder le sujet, je voulais donner une précision sur l'écriture de l'article. En principe, j'écris soit en inclusif (quand l'article est court) soit au masculin pour aller plus vite. Cette fois-ci j'ai décidé que tout sera écrit au féminin – c'est ma petite révolution pour aujourd'hui – parce que j'en ai marre de recevoir des courriers à « Monsieur le Directeur », marre que les gens se posent même pas la question de la possibilité qu'un établissement puisse être dirigé par une femme !
La question de l'avenir du télétravail est revenue sur le devant de la scène il y a quelques temps suite aux ordonnances Macron. On en a entendu un peu de tout, il y a déjà beaucoup d'articles et de sources internet qui en parlent mais je voulais essayer, moi aussi, de faire un (petit) résumé du principal à retenir.
Je voulais faire un article assez complet, parce que je trouve toujours intéressant de suivre l'évolution du travail au fur et à mesure des différents textes. J'avais commencé à raconter l'histoire du télétravail chronologiquement, mais je me suis rendue compte que c'était vraiment rasoir et ça me forçait à répéter plusieurs fois les mêmes choses. Donc j'ai finalement préféré organiser mon article en séparant les différentes thématiques du télétravail.
Nous verrons tout d'abord les textes relatifs au télétravail, puis les modalités du télétravail, dont la prise en charge des coûts.
Les textes relatifs au télétravail
Le télétravail a été défini et modifié par plusieurs textes, je vous fais donc un résumé rapide de la chronologie !
Le concept de télétravail existe depuis de nombreuses années. D'après ce site la notion de télétravail remonterait aux années 1950 aux États-Unis notamment grâce aux travaux de Norbert Wiener sur la cybernétique.
L'accord-cadre européen du 16 juillet 2002
En Europe, les premiers textes réglementant cette nouvelle forme de travail apparaissent dans les années 2000. La Commission européenne travaille alors à la « modernisation et l'amélioration des relations de travail », invitant ainsi les partenaires sociaux à négocier ensemble un cadre et des règles permettant la mise en place concrète du télétravail en Europe. C'est ce qu'ils ont fait, par le biais de l'accord-cadre européen sur le télétravail du 16 juillet 2002.
Je vous encourage vivement à lire le premier article de cet accord-cadre, les « Considérations générales » parce que ça pose un peu le truc. Vous verrez qu'on y parle beaucoup de qualité de vie au travail (ou pas).
Dans le cadre de la Stratégie Européenne pour l’Emploi, le Conseil européen a invité les partenaires sociaux à négocier des accords en vue de moderniser l’organisation du travail, incluant des arrangements de travail flexibles, dans le but d’améliorer la productivité et la compétitivité des entreprises et de réaliser l’équilibre nécessaire entre la flexibilité et la sécurité.
L'accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005
C'est schématiquement la traduction française de l'accord-cadre européen signé trois années plus tôt. Comme précisé dans un article précédent, un accord national interprofessionnel n'est pas un texte législatif, c'est un accord entre syndicats d'employeuses et syndicats d'employées (ce serait un peu comme un accord d'entreprise mais à l'échelle nationale et pour tous les secteurs d'activité). Vous pourrez le lire ici.
La loi 2012-387 du 22 mars 2012
C'est la traduction, dans la loi, de l'accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005. Mais pour montrer qu'ils avaient quand-même un peu bossé dessus en 7 ans, les députés ont modifié deux-trois trucs. Le Code du Travail a donc été agrémenté d'une section 4 dans le chapitre 2 du titre 2 du livre 2 de la première partie de la partie législative :) (de rien, ça me fait plaisir !).
Ce sont les articles L1222-9 à L1222-11 que vous pouvez trouver ici (et merci encore aux dévs de Legifrance qui font franchement un boulot extraordinaire).
Cette loi a ensuite été modifiée plusieurs fois :
- par l'ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;
- par la loi 2018-217 du 29 mars 2018 ;
- par la loi 2018-771 du 5 septembre 2018.
Et comme je suis mignonne, je vous expliquerai les modifications…
Bon, ça, c'était les textes. Entrons maintenant dans le vif du sujet : le télétravail : quoi ? pour qui ? quand ? comment ? et toutes les autres questions que vous ne vous posiez pas !
Les modalités du télétravail
Une nouvelle forme de travail… mais pas que
L'accord cadre européen sur le télétravail montre, dans son introduction, que l'Europe avait plusieurs raisons d'inciter ses états membres à réfléchir à l'organisation du télétravail (je cite ici les différentes raisons invoquées par le texte) :
- réconcilier la vie professionnelle et de la vie sociale des travailleuses ;
- accroître l'autonomie des travailleuses dans l'accomplissement de leurs tâches ;
- tirer le meilleur parti de la société de l'information ;
- allier la flexibilité et la sécurité ;
- améliorer la qualité des emplois (whatever that means) ;
- améliorer les chances des personnes handicapées sur le marché de l'emploi (mais l'accord ne mentionne nulle part des conditions particulières pour les personnes handicapées, hein, ne vous emballez pas, il faudra attendre la loi de septembre 2018).
Il est également précisé que l'accord n'a pas pour but de dégrader le niveau général de protection sociale des travailleuses, et que chaque pays devra ensuite adapter le texte afin de prendre en compte les besoins spécifiques qui pourraient exister. Ce qui est logique, dans la mesure où cet accord fixe une sorte de cadre commun, qui doit ensuite être concrètement mis en place dans chaque pays membre.
La définition du télétravail
L'accord-cadre européen de 2002 définit le télétravail comme « une forme d'organisation et / ou de réalisation du travail, utilisant les technologies de l'information, dans le cadre d'un contrat ou d'une relation d'emploi, dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l'employeuse, est effectué hors de ces locaux de façon régulière ».
Cette définition a l'avantage d'être suffisamment générale pour s'adapter à plusieurs situations mais on note néanmoins trois subtilités, puisque le télétravail est un travail :
- qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l'employeuse : cela exclut donc les missions en régie, ou encore, dans un autre domaine, la commissaire aux comptes chez une cliente ;
- effectué hors des locaux de l'employeuse : vous remarquerez qu'il n'est pas écrit « à domicile », ce qui permet d'englober d'autres situations (espaces de coworking, par exemple) ;
- de façon régulière : vous allez me dire, ce n'est pas très précis, qu'est-ce qu'on entend par « régulière »… certes, mais ça donne au moins une sorte de repère - disons que si c'est 3 ou 4 fois par an, ce n'est pas du télétravail.
La télétravailleuse est donc « toute personne qui effectue du télétravail tel que défini ci-dessus ». Alors là encore, une petite nuance : la loi distingue la télétravailleuse de la travailleuse à domicile.
Une travailleuse à domicile est une « salariée exécutant chez elle des travaux contre une rémunération forfaitaire fixée à l'avance sur la base d'un tarif horaire et d'un temps d'exécution ».
Si la télétravailleuse travaille à domicile, alors elle est également travailleuse à domicile mais ce n'est pas automatique. Si c'est le cas, elle bénéficiera des droits et devoirs des deux statuts.
Cette définition reste la même dans l'accord national interprofessionnel de 2005 mais la télétravailleuse est désormais « une personne salariée de l'entreprise », ce qui est légèrement plus précis que dans l'accord-cadre européen.
Dans la loi de 2012, il est précisé que la définition du télétravail ne doit pas « porter préjudice de l'application, s'il y a lieu, des dispositions du présent code protégeant les travailleurs à domicile » (d'où le fait que si vous êtes à la fois télétravailleuse et travailleuse à domicile, vous dépendez des deux sections du Code du Travail).
En dehors de cette précision, la définition reste la même.
L'ordonnance Macron de 2017 supprime simplement de la définition du télétravail les mots « de façon régulière » laissant donc le champ libre aux télétravail occasionnel (oui, vous allez me dire, « occasionnel » c'est tout aussi flou que « régulier »… certes).
Les deux lois de 2018 ne modifieront pas cette définition.
La mise en place du télétravail
D'une façon générale, tous les textes précisent que le télétravail :
- doit avoir un caractère volontaire pour les deux parties ;
- peut être initial (condition d'embauche, prévu dans le descriptif du poste lui-même) ou ultérieur ;
- doit être réversible s'il est mis en place postérieurement à l'embauche (les modalités diffèrent selon les textes mais le principe reste le même).
De ce fait, si le télétravail est proposé par l'une des deux parties ultérieurement à l'embauche, l'autre partie a la possibilité de refuser cette proposition. Ce refus n'est donc pas un motif de rupture de la relation de travail ni une modification des conditions d'emploi (classification du salarié, salaire, horaires, etc.).
L'accord national interprofessionnel de 2005 apporte ensuite quelques précisions :
- s'il est mis en place ultérieurement, il doit faire l'objet d'un avenant au contrat de travail ;
- il doit donner lieu à une période d'adaptation (une sorte de période d'essai pendant laquelle chacune des deux parties peut y mettre fin moyennant un délai de prévenance défini à l'avance) ;
- s'il est mis en place dès l'embauche, la salariée a tout de même la possibilité de « postuler à tout poste vacant, s'exerçant dans les locaux de l'entreprise et correspondant à sa qualification » et pour lequel elle « bénéficie d'une priorité d'accès ».
La loi de 2012 va un peu plus loin en stipulant que l'employeuse doit informer la salariée en télétravail si ce genre de poste se libère.
Et, nouveauté, la loi donne désormais la possibilité de mettre en œuvre le télétravail « en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d'épidémie, ou en cas de force majeure » si cette organisation est nécessaire à la continuité de l'activité de l'entreprise et / ou permet de garantir la protection des salariées.
L'ordonnance Macron de septembre 2017 va apporter des précisions supplémentaires sur les conditions de mise en place du télétravail (par accord collectif ou charte de l'employeuse après avis des représentants du personnel ou simple accord « formalisé par tout moyen » entre l'employeuse et la salariée si le télétravail est occasionnel).
Cette ordonnance introduit également une nouvelle contrainte pour l'employeuse qui doit désormais motiver sa réponse si elle refuse le passage au télétravail d'une salariée d'un poste qui y serait éligible. Alors là encore, la loi dit juste que l'employeuse doit expliquer pourquoi elle refuse, rien n'est dit sur la qualité des raisons.
La loi de mars 2018 permet, à défaut d'accord collectif ou de charte de l'employeuse, de formaliser un accord par tout moyen entre employeuse et salariée pour mettre en œuvre le télétravail, même si celui-ci est régulier.
Elle ajoute les « épisodes de pollution » aux situations dans lesquelles le télétravail peut être mis en place pour garantir la sécurité des salariées.
La loi de septembre 2018 ajoute une précision supplémentaire : si une travailleuse handicapée ou une proche aidante (définition spécifique du Code de l'Action Sociale et des Familles) se voient refuser une demande de télétravail, l'employeuse doit motiver son refus. Encore une fois, pas de précision sur la qualité de la réponse, ou ce qu'il se passe si la salariée jugeait la raison non recevable.
Je pense que la subtilité, par rapport à cette contrainte qui existe déjà pour toute salariée comme évoqué plus haut, vient du fait que la demande peut être formulée dans ces deux cas précis, y compris si le poste n'est pas a priori défini comme un poste éligible dans l'accord collectif ou la charte de l'employeuse.
Les conditions d'emploi de la télétravailleuse
Tous les textes s'accordent sur le fait qu'une télétravailleuse dispose des mêmes droits et devoirs que ses collègues, notamment en termes de :
- formation professionnelle (accès aux formations, possibilités de carrière) ;
- représentation du personnel (communication, droit de vote, éligibilité, etc.) ;
- accident du travail (depuis l'ordonnance Macron, « l'accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l'exercice de l'activité professionnelle de la télétravailleuse est présumé être un accident de travail » (c'était peut-être le cas avant mais en tous cas, ce n'était pas écrit noir sur blanc).
Le télétravail nécessite néanmoins quelques ajustements spécifiques et c'est pourquoi les différents textes prévoient des conditions particulières, notamment :
- la protection des données utilisées par la télétravailleuse dans le cadre de son travail ;
- le respect de la vie privée de la télétravailleuse ;
- la prévention de l'isolement (possibilité de rencontrer ses collègues, accès aux informations de l'entreprise, etc.) – cet aspect n'a cependant pas été repris dans le Code du Travail ;
- l'information des restrictions d'usage des équipements et outils informatiques (y compris Internet) et des sanctions encourues en cas de non-respect de ces restrictions ;
- l'organisation d'un entretien annuel qui porte entre autres sur les conditions et la charge de travail de la salariée.
Autre chose ayant disparu de la loi dès 2012 : la visite du lieu de travail. En effet, l'accord-cadre européen de 2002 et l'accord national interprofessionnel de 2005 prévoyaient que pour s'assurer du respect des règles de santé et de sécurité par la télétravailleuse, l'employeuse, les représentantes des travailleuses et / ou les autorités compétentes ont accès au lieu du télétravail. Bémol : si le télétravail se fait à domicile, la visite est soumise à une information préalable et l'accord de la télétravailleuse. En contrepartie, la télétravailleuse peut demander une visite d'inspection.
Afin de respecter la vie privée de la salariée :
- un moyen de surveillance peut être mis en place mais il doit être proportionné à l'objectif et dans le respect des prescriptions de la CNIL et de la directive 90/270 relative aux écrans de visualisation (et, selon les textes, faire l'objet d'une information ou consultation des représentantes du personnel) ;
- les plages horaires pendant lesquelles la salariée peut être contactée doivent être définies à l'avance (les modalités diffèrent selon les textes mais le principe reste le même).
La prise en charge des coûts
Et… nous y voici enfin : la thune !
L'accord-cadre européen de 2002 prévoit un article « Équipements » stipulant que les questions concernant les équipements de travail, la responsabilité et les coûts « sont définis clairement avant le début du télétravail » – mais il ne dit pas où et comment.
Cependant, l'accord précise que
en règle générale, l'employeuse est chargée de fournir, d'installer et d'entretenir les équipements nécessaires au télétravail régulier, sauf si la télétravailleuse utilise son propre équipement. Si le télétravail est réalisé régulièrement, l'employeuse couvre les coûts directement causés par ce travail, en particulier ceux liés aux communications (téléphone, internet notamment).
L'article reste ici assez vague et reste donc ouvert à interprétation en ce qui concerne les « coûts directement causés par ce travail » (outre les frais de communication, quid du loyer par exemple ?) ainsi que sur le mode de calcul (prise en charge totale ? prorata ?).
Au-delà de cette prise en charge, l'employeuse doit également fournir à la télétravailleuse « un service approprié d'appui technique ».
En termes de responsabilité, c'est l'employeuse, conformément à la législation en vigueur dans chaque pays et aux conventions collectives, qui supporte « les coûts liés à la perte ou à l'endommagement des équipements et données utilisés par la télétravailleuse ». En contrepartie, la télétravailleuse « prend dûment soin des équipements qui lui sont confiés ».
L'accord national interprofessionnel de 2005 reprend à peu près les mêmes conditions mais va un peu plus loin : si la télétravailleuse utilise son propre matériel, l'employeuse doit en assurer « l'adaptation et l'entretien ».
La loi de mars 2012 n'est pas beaucoup plus précise, puisqu'elle mentionne la prise en charge des
coûts découlant directement de l'exercice du télétravail, notamment le coûts des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci.
Or, c'est déjà ce qui était sous-entendu par les accords précédents puisque l'employeuse devait « fournir, installer et entretenir » les matériels, et logiciels. Donc l'interprétation est toujours ouverte quant aux coûts autre que les « notamment » indiqués.
Pourtant, c'est la suppression de cette ligne, dans l'ordonnance Macron de 2017 qui a un peu secoué le monde du télétravail. Pourquoi ? Parce que si la loi n'était pas très précise, l'URSSAF, elle, apportait des précisions quant aux coûts pris en charge et leur mode de calcul et notamment le loyer, le chauffage, l'électricité, etc.
Je ne vais pas tout recopier ici, mais je vous incite fortement à aller consulter ce tableau réalisé par l'URSSAF (complet, clair et précis).
Pour l'URSSAF, ces frais sont considérés comme des frais professionnels puisqu'ils sont engagés pour la réalisation du travail (certes, vous auriez besoin de chauffage chez vous, mais si vous n'y travailliez pas toute la journée, vous ne chaufferiez pas votre maison de la même façon toute la journée).
Attention, cela sous-entend que cette prise en charge n'est pas soumise à cotisations, et doit donc être versée en net, et non dans le brut (ni en salaire ni en avantage en nature).
L'URSSAF précise de plus que la télétravailleuse a droit aux Titres Restaurant au même titre que ses collègues puisque sa journée s'organise, comme ses collègues, en « deux vacations entrecoupées d'une pause réservée à la prise d'un repas » (c'est beau non comme tournure ? Bon, ils ont oublié le goûter de 10 h et le goûter de 16 h mais on peut le prendre devant l'ordinateur). Ce bénéfice fait suite à un changement de position de la Commission Nationale des Titres Restaurant en 2011 (rigolez pas, elle existe pour de vrai, c'est la commission qui gère les règles d'attribution des Titres Restaurant et leur utilisation).
Bon alors, dans tout ça, comment on s'y retrouve ? Est-ce que la suppression de cette ligne dans le Code du Travail annule les instructions de l'URSSAF ? Est-ce qu'elle a été supprimée justement parce que c'est l'URSSAF qui gère ça ? Mais dans ce cas, pourquoi ne pas avoir fait un renvoi aux dispositions de l'URSSAF à ce sujet ?
Bref, c'est un peu le bazar et personne n'est d'accord. Je ne peux donc pas vous apporter de réponse donc je vais me contenter de vous donner mon point de vue (et vous pouvez également aller lire cet article pas trop mal, écrit par une vague connaissance :D).
Pour moi, malgré la loi, l'accord national interprofessionnel de 2005 continue de s'appliquer, notamment parce que le silence ne vaut pas interdiction, donc je considère qu'il existe désormais une carence dans la loi et donc je remonte au texte précédent, toujours en vigueur tant qu'il n'est pas contredit par la loi. Et, techniquement, il ne l'est pas.
Et d'une manière générale, j'aurais tendance à suivre les recommandations de l'URSSAF.
Cependant, il est vrai que le site de l'administration française précisait dans un article d'octobre 2017 que l'employeuse n'était plus dans l'obligation de prendre en charge les coûts liés au télétravail. Lorsqu'on consulte aujourd'hui la fiche technique du télétravail sur le même site, rien n'est dit sur ces coûts.
Enfin, l'ordonnance Macron a ajouté un « Nota » en pied d'article qui ne doit pas être négligé :
Conformément à l'article 40-VII de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, pour les salariées dont le contrat de travail conclu antérieurement à ladite ordonnance contient des stipulations relatives au télétravail, sauf refus de la salariée, les stipulations et dispositions de l'accord ou de la charte mentionnés au présent article, issu de ladite ordonnance, se substituent, s'il y a lieu, aux clauses du contrat contraires ou incompatibles. La salariée fait connaître son refus à l'employeuse dans le délai d'un mois à compter de la date à laquelle l'accord ou la charte a été communiqué dans l'entreprise.
Donc, la télétravailleuse peut refuser l'application des nouvelles conditions du télétravail, si elle était déjà télétravailleuse avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance. La note ne dit pas en revanche ce qu'il se passe après le refus !
Et, dernière chose, mais qui n'a pour le coup aucune valeur légale : je me dis qu'en temps qu'employeuse c'est quand-même plus honnête de prendre en charge les coûts selon les recommandations de l'URSSAF. Pourquoi ? Déjà parce que finalement, les domaines d'activité et les emplois concernés par le télétravail sont assez réduits, ça concernera donc peu probablement l'ensemble du personnel. Ensuite, parce que, dans les faits, le télétravail permet des économies en termes de charges pour l'entreprise (taille des locaux, électricité, chauffage, risques d'accident de trajet, etc.) alors que la télétravailleuse prévoit rarement de mettre son bureau au milieu de sa salle de bain et prévoit donc généralement un logement avec un bureau ou finance un espace de coworking – du moment que la télétravailleuse n'abuse pas non plus en désignant un bureau de 54 m² chauffé au fioul à 27 degrés ! Enfin, parce que ça aura aussi des impacts écologiques, même si on peut sourire à cet argument (moins de trajets, repas maison, etc.). Et si vous vous posiez la question, oui, je crois aussi aux licornes :P.
Bref, voilà pour mon point de vue.
Télétravail et travailleuses handicapées
Il faut attendre la loi de septembre 2018 pour mentionner les travailleuses handicapées dans la section du télétravail du Code du Travail : l'accord collectif ou la charte de l'employeuse sur le télétravail devant en effet préciser « les modalités d'accès des travailleuses handicapées à une organisation en télétravail, en application des mesures prévues à l'article L. 5213-6 » qui, lui-même, stipule que :
pour garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleuses handicapées, l'employeuse prend, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleuses mentionnées aux 1° à 4° et 9° à 11° de l'article L. 5212-13 d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer ou d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée. Ces mesures sont prises sous réserve que les charges consécutives à leur mise en œuvre ne soient pas disproportionnées, compte tenu de l'aide prévue à l'article L. 5213-10 qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeuse. Le refus de prendre des mesures au sens du premier alinéa peut être constitutif d'une discrimination au sens de l'article L. 1133-3.
Mouais… bon, c'est pas révolutionnaire. À mon sens, ça ne va pas assez loin, c'est beaucoup de blabla pour finalement rien de vraiment très concret, mais ça a au moins le mérite de présenter un début de prise de conscience par les députés.
Voilà, c'est tout pour ce sujet, j'espère que ça vous aura instruit et intéressé :)
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